Économies sur le loyer pour les uns, lutte contre la solitude pour les autres, la résidence intergénérationnelle séduit de plus en plus. Il faut bien dire que les jeunes et les personnes âgées sont les populations les plus fragilisées socialement et financièrement depuis la crise sanitaire. Focus sur cette nouvelle forme de cohabitation.
Connaissez-vous la cohabitation intergénérationnelle ? Comme son nom l’indique, il s’agit pour un jeune et une personne âgée de partager un même logement. Le concept n'est pas nouveau. Il s'est développé depuis quelques années sous l'impulsion d'associations soucieuses de mettre en relation deux générations souffrant de précarité sociale et financière. C’est donc sous couvert de solidarité que ces types d’habitat sont nés sans encadrement juridique dans un premier temps. Puis, la loi pour l'évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, la loi ÉLAN, du 23 novembre 2018, est venue apporter le cadre légal qui faisait défaut. L'arrêté du 30 janvier 2020 l’a complété en instaurant une charte qui réglemente ce type de contrat. Ainsi, la cohabitation intergénérationnelle n’est pas éligible à un bail classique par exemple. Autre précision de l’arrêté : l’habitat doit compter une chambre de plus de 9m2 avec des pièces de vie commune à définir.
Réservée aux personnes de moins de 30 ans et de plus de 60 ans autonomes, la colocation intergénérationnelle concerne potentiellement 55 % de la population française, soit 38 millions de personnes. Pour être sûr de rester dans le cadre de la loi ELAN, mieux vaut se faire accompagner par une association dont c’est le métier. Colibree Intergénération par exemple propose une solution digitale très aboutie qui permet de mettre en relation les personnes via une plateforme digitale. “Aujourd’hui, on n’a pas tous les mêmes besoins et les mêmes envies. Il y en a qui ont envie de simplement partager un toit pour avoir une présence rassurante et bienveillante. Il y en a d’autres qui ont besoin de cette expérience pour arrondir leurs fins de mois…” explique Mélanie Slufcik, fondatrice de Colibree. La plateforme permet ainsi de faire “matcher” les profils. Mais à l’inverse des sites de rencontre, la mise en relation reste gratuite. L’accompagnement proposé fait la force de ces structures issues de l’économie sociale et solidaire : “Nous définissons les attendus entre les deux partis. Par exemple, on demande obligatoirement : quel est le temps minimum accordé ? Quels sont les services souhaités ? Quelle est la réciprocité voulue… ? Si les personnes ne sont pas d’accord sur ces points, ça ne matchera jamais au quotidien” souligne Mélanie Slufcik. L’encadrement du prix fait également partie des missions de l’association car, au-delà de certains barèmes, les loyers peuvent être soumis à l’impôt.
L’habitat intergénérationnel va au-delà de la personne âgée qui loue une chambre pour un étudiant. Imaginé dès 2008 de la rencontre d’un architecte Eric Vialatel et du bailleur départemental Val d’Oise Habitat, Les Maisons de Marianne ont co-construit avec les villes, puis développé un habitat solidaire innovant, lieu de rencontres et de partage. Dans les années 2010, des constructions spécifiques gérées par les bailleurs sociaux, en collaboration avec des organismes de solidarité, comme Habitat et Humanisme, ont vu le jour. Et depuis 2018, les promoteurs se sont décidés à lancer des programmes ouverts à l’accession ou à la location dans le parc privé. Au programme, des logements neufs super-équipés : volets roulants automatiques, halogènes avec détecteurs de mouvements au sol, douches sans ressaut avec barres de maintien, interphones couplés à un système de visiophonie connecté à une tablette… Néanmoins, il ne s’agit pas d’une résidence sénior ou d’un Ehpad. « Nous intervenons à la fois sur la phase promotion-construction et sur l'animation des résidences pour proposer, sans surcoût pour le bailleur et le locataire, une solution pour le logement favorisant le maintien à domicile et le lien social. Un modèle qui permet de repousser l'âge de la dépendance. » précise Raphaëlle Gilaber, Directrice Générale des Maisons de Marianne. Avec près de 30 résidences intergénérationnelles, Les Maisons de Marianne s’imposent en France et intègrent les exigences du logement social traditionnel tout en offrant une approche servicielle innovante.
Nul doute que ces résidences vont se développer dans les prochaines années comme le montre les 1 800 propositions issues de la consultation citoyenne menée par le ministère de l’Autonomie. Au rang des priorités : le besoin d’un lieu de vie différent de l’Ehpad ou du domicile et la nécessité de créer des liens entre générations.